Voici un écho rapporté par un paroissien de la conférence organisée par la paroisse du Sart-Tilman, le 26 octobre 2017, sur le thème « Stratégie par la parabole » de Mr Etienne CHOME
STRATEGIE NON-VIOLENTE PAR LA PARABOLE
Face à la violence quotidienne rencontrée par chacun que nous inspire la vie du Christ ? s’interroge Etienne CHOME, Professeur à l’Institut international Lumen Vitae, Chercheur à l’UCL et auteur de la méthode C-R-I-T-E-R-E qui s’articule sur un cadre de droit à respecter, le développement d’une communication vraie et une négociation efficace en préservant la relation. Conférence débat donnée dans le cadre des « Jeudis du Sart Tilman », en l’église Saint-Hubert.
Comment passer du différend qui nous oppose à la différence qui nous enrichit l’un et l’autre pour mieux gérer nos conflits ?
Thème actuel et très ancien qu’on peut découvrir dans plusieurs civilisations antiques, l’Ancien et le Nouveau Testament.
La différence, avec ses conflits, colle à la peau comme une fatalité et va jusqu’à empoisonner les personnes qui nous sont chères.
La non-violence pratiquée par Jésus est un art et un tremplin qui mène l’interlocuteur au cœur endurci à prendre position, à faire la vérité tout en ne le brusquant pas.
E. Chomé nous invite à nous mettre à l’école du Christ, artisan de paix, qui n’entre pas dans le jeu du « méchant », ne se laisse pas enfermer par son interlocuteur.
Le Nouveau Testament comprend de nombreuses paraboles, près de 30 voire 70 pour certains, dans les Evangiles de Matthieu, Marc et Luc.
Les paraboles, à l’opposé des mythes, pour comprendre le monde, et des fables merveilleuses, permettent de s’exprimer de manière détournée.
La parabole est un art littéraire bien présent dans toute la Bible.
Ainsi, la parabole adressée au roi David par le prophète Nathan (2 Sm 12, 1-7), un des chefs d’œuvre littéraire de l’Ancien Testament relatant que le Roi fit frapper par l’épée Urie le Hittite, officier de son armée royale en campagne contre les Ammonites, pour prendre son épouse Bethsabée pour femme et commettre l’adultère.
« Le riche avait petit et gros bétail en très grande abondance.
« Le pauvre n’avait qu’une brebis, une seule petite qu’il avait achetée …
« Un hôte se présenta chez l’homme riche ; celui-ci épargna son bétail pour nourrir le voyageur.
« Le riche vola la brebis du pauvre et l’apprêta pour son visiteur.
« En grande colère contre ce riche, David dit à Nathan : « L’homme qui a fait cela mérite la mort ! Il remboursera la brebis au quadruple pour avoir commis cette action et n’avoir pas eu de pitié. »
« Nathan dit : « Cet homme, c’est toi ! »
Ainsi, pour éviter d’aborder de front et de juger David qui se serait mis sur sa défensive et aurait contre-attaqué, Nathan ouvre un espace en racontant ce mélodrame mettant en scène deux personnages anonymes : un riche et un pauvre.
Par cette parabole, Nathan place David dans sa fonction de juge d’Israël et le met en route. Pris par l’histoire, David, en s’appuyant sur le droit, prend position et prononce un jugement vis-à-vis de l’homme riche qui a volé LA brebis du pauvre : « Cet homme mérite la mort ». Nathan, sans recourir à la contrainte, conclut : « Cet homme, c’est toi ».
Le roi David prend position en faveur de la Justice et sa propre conscience est mise en cause. D’où, l’appel à se repentir et à la conversion.
Dans un contexte de blocage, la parabole ouvre un espace. Elle rejoint le destinataire et le met en route. Elle organise une tension qui dé-route le destinataire et l’engage à prendre position.
La parabole n’est pas un enseignement mais un langage, une parole de changement.
Au moyen de questions, la parabole est au service d’un dialogue, déclare Etienne Chomé.
Même stratégie employée par Jésus dans ses paraboles, entre autres dans celle des vignerons révoltés contre leur Maître, rapportée par Matthieu (21, v. 23 et 33-41).
Dans le Temple, Jésus enseigne. Quand pour le mettre à l’épreuve, les grands prêtres et les anciens du peuple vinrent le trouver pour lui dire : « Par quelle autorité fais-tu cela ? Et qui t’a donné cette autorité ? »
Alors, Jésus pose des questions, demande l’avis de ses interlocuteurs par le moyen d’une histoire fictive.
Jésus répond par la Parabole des vignerons homicides qui, après avoir tué les serviteurs, tuèrent le fils du Maître de la vigne parti à l’étranger.
Jésus demande : Lors donc que reviendra le Maître vigneron, que fera-t-il à ces vignerons ? »
Ils lui répondirent : « Le maître fera misérablement périr ces misérables, et il louera la vigne à d’autres vignerons qui lui remettront les fruits en temps voulu. »
Pas de confrontation de la part de Jésus, pas de polémique et par la parabole grands prêtres et anciens entrent dans l’histoire et sont déroutés : les condamnateurs se condamnent eux-mêmes.
Cependant, alors que le roi David se convertit, les grands prêtres se durcirent et condamnèrent Jésus.
Etienne Chomé après avoir évoqué d’autres Paraboles : celles des ouvriers de la 11ème heure, du semeur, du grain de moutarde, etc., définit comme suit la PARABOLE :
La parabole est, dans un contexte de blocage, une stratégie de dialogue faisant le détour d’une histoire fictive mais réaliste qui met en route l’interlocuteur en rejoignant sa vérité et qui, en même temps, le surprend et le déroute profondément par un jeu de tension, en vue de l’ouvrir à un autre niveau de vérité et surtout en vue d’un changement de son comportement.
Le cœur du jeu parabolique tient à 3 temps qui s’enchaînent :
- la parabole DETEND d’abord et COMPREND son destinataire ;
- puis, elle TEND AILLEURS et le SURPREND.
- Enfin, elle lui TEND la PERCHE : PRENDS POSITION.
Par cette stratégie non violente, Jésus évite la confrontation directe et, en même temps, il ose une parole d’interpellation vive. Il ne cherche pas à avoir raison mais à travers le questionnement indirect, Jésus conduit ses interlocuteurs à faire la vérité.
PHS.