A toi qui …

À toi, à vous qui n’avez cessé de m’interpeller…

Oh combien je risque de mettre le pied dans le plat et d’aggraver une situation déjà complexe et parfois difficile à vivre ! Des circonstances l’obligent, puisque vous ne manquez pas de me titiller pour me demander mon avis sur une longue liste de choses dont le fait même d’être prêtre aujourd’hui et maintenant dans notre communauté. Pour vous répondre, j’emprunte la liberté qui caractérise l’homme et le goût de la vérité qui caractérise le pasteur et le lecteur de philosophie.

En effet, ce que Camus dit de l’écrivain ou de l’artiste dans son fameux discours de Stockholm, peut aussi se dire de tout chrétien et d’un prêtre. Sa vie et sa mission se forgent « dans cet aller-retour perpétuel de lui aux autres, à mi-chemin de la beauté dont il ne peut se passer et de la communauté à laquelle il ne peut s’arracher ». Oh oui, la communauté, ce chronotope, cet espace-temps où peuvent se jouer à la fois le plus grand bonheur, le salut ; mais aussi la pire tristesse si on ne soigne pas suffisamment nos relations.

À l’exemple de Jésus, le Bon Pasteur ne méprise rien; il s’oblige à comprendre au lieu de juger.  Il n’est pas un surhomme, mais peut-être un héros. Car, comme dit Boris Cyrulnik, le surhomme se place au-dessus de tout et de tous en consacrant ses qualités à son propre service. Le héros au contraire est vulnérable, il sait ce que signifie être blessé, il est humble et consacre ses qualités au service des autres. Il donne tout son être afin de garder le dynamisme d’une communauté vivante, en acceptant autant qu’il peut les deux charges qui font la grandeur de sa vocation : le service de la vérité et celui de la liberté. Puisque sa vocation est de réunir le plus grand nombre d’hommes possible, elle ne peut s’accommoder uniquement aux principes qui sont les siens mais est ouvert au compromis et au dialogue. Aucun prêtre n’est sûr qu’il puisse jamais accomplir cette tâche immense et noble, mais il est sûr que, partout où il se retrouve, il est appelé à tenir son double pari de vérité et de liberté.

Une liberté à cultiver, un effort de s’affranchir de tout décorum pour rechercher l’essentiel, le sens profond des choses et revoir à frais nouveaux le message de l’évangile et les catégories théologiques. Enfin, c’est vivre, c’est être en marche, c’est aimer son temps et être l’homme de son époque.

N’est-ce pas ce que nous essayons de faire au quotidien ?  
Rodney B.

Les commentaires sont fermés.

Créez un site ou un blog sur WordPress.com

Retour en haut ↑