Con…finement!
Notre pays a adopté depuis quelques jours le plan de confinement global où le citoyen risque de devoir justifier sa présence à travers les rues. Cette mesure vise certes à réduire la propagation du Covid-19, mais ne pourrait-elle pas permettre par la même occasion un retour sur soi ? L’occasion de se reconnaître, de se rencontrer, de retrouver ce qui nous anime, ce qui nous meut ?
Bref, être un peu comme Narcisse, se retrouver devant le miroir de sa vie, permettre à la fleur du printemps, la fleur de la vie d’éclore à nouveau ; savoir laisser la vie éclore en nous, renaître, se métamorphoser, devenir nouveau.[1] C’est à ce moment que l’on comprend qu’être narcissique n’est pas forcément une tare psychologique ou une manière de se complaire dans une image vaine et fugitive de soi, c’est aussi un moyen de se réapproprier, de rassembler les morceaux épars de son être, parfois dispersés entre le boulot, le sport, le bénévolat, etc. Plotin, celui qui est considéré comme la figure emblématique de la philosophie néoplatonicienne nous enjoint à un « retour sur soi » en ces termes : «Reviens en toi-même et regarde. Si tu ne vois pas encore ta propre beauté, fais comme le sculpteur d’une statue qui doit devenir belle…Enlève tout ce qui est superflu, redresse ce qui est oblique…ne cesse de sculpter ta propre statue, jusqu’à ce que brille pour toi la divine clarté de la vertu ». Un temps pour soi, au-delà de l’inquiétude provoquée par le virus. Se sculpter, au-delà de l’inquiétude provoquée par le chômage économique. Être avec soi-même ! Plus facile à dire qu’à faire.
Soyons un peu narcissiques chers amis ; Narcisse n’est pas souvent ce que l’on croit. Au XIXe il a été chanté par les poètes, il leur apparut alors comme la figure qui éclaire le drame qui nous est propre, il nous fait sentir bien dans notre peau malgré les contrecoups de la nature et accepter notre propre identité. Il nous ouvre à une responsabilité plus authentique nous dit Fabrice Midal. On a besoin de cette authentique responsabilité, de cette conscience de soi et de la volonté de se métamorphoser, de changer de façon de vivre en ces temps qui sont les nôtres.
Ce confinement n’est pas un enfermement, mais la liberté autrement vécue et retrouvée…peut-être !
[1] Cfr. Fabrice Midal, Narcisse n’est pas égoïste, Flammarion, Paris 2019, p. 63.