Carpe Diem!

Carpe Diem, ou le bonheur aujourd’hui

Horace, un homme imprégné de la pensée philosophique stoïcienne et épicurienne, s’est entrepris de rassurer ses contemporains sur la nécessité de bien vivre le présent et l’accepter comme le plus grand cadeau venu des dieux. Dans son Ode « à Leuconoé », il engage son interlocuteur à mettre à profit le temps qui lui est donné aujourd’hui ; le temps d’aimer, d’accueillir, de faire du bien…de devenir meilleur. Le passé n’étant plus, demain n’est pas encore là, il est nécessaire que le présent soit vécu comme un présent ; ce que l’on reçoit et qui fait son bonheur. Le poète le dit avec force éloquence, en ces termes :

(…) sois sage, filtre tes vins et mesure tes longues espérances à la brièveté de la vie.

Pendant que nous parlons, le temps jaloux s’enfuit.
Cueille le jour (Carpe Diem), et ne crois pas au lendemain.

Ce poème absolument célèbre duquel la postérité ne retiendra que le bon vieux « Carpe diem » fait référence à l’immense et inévitable certitude que la vie a été reçue pour être redonnée. Chaque instant est une occasion de faire naître et grandir cette vie au-delà des obscurités de notre monde ; obscurités à vivre non comme absence de lumière mais plutôt comme possibilité à faire jaillir cette lumière dans son entourage.

Cueillir le jour présent c’est se lancer corps et âme dans cette aventure qu’est la vie, c’est vouloir se dépasser sans se perdre dans une folle course au record, bref, savoir tirer de chaque situation un maximum de bonheur. Horace savait autant que nous que la nature est comme un usurier impatient qui nous demande des comptes au moment où l’on si attend le moins et il a voulu que ses lecteurs puissent faire de l’écoulement du temps un allié plutôt qu’un ennemi. Le bonheur est de tout instant. Il a compris que pour être heureux, nul n’a besoin d’avoir son nom écrit au panthéon des dieux, faire partie de l’Olympe, devenir divin ou s’enivrer de nectar et d’ambroisie. Pour être heureux, il n’est pas nécessaire de rêver au séjour de Zeus, aux milliers de prairies émaillées de fleurs variées faisant penser au printemps éternel ; un lieu sans hivers excessifs ni étés étouffants où brille constamment l’éclat modéré du soleil. Il suffit de vivre l’instant présent convenablement et ne pas laisser la patine du temps se poser sur ses capacités créatrices. Carpe diem, invente ta vie au jour le jour…car le temps t’a été donné pour que tu te construises. Fais ce que tu as à faire aujourd’hui sans te laisser freiner par les soucis de demain.

Je me souviendrai toujours de cette phrase du rabbi Yohanan Ben Zakkaï : « Si tu as un jeune arbre dans les bras et qu’on te dit que le Messie est venu, et que c’est la fin du monde, plante d’abord l’arbre, et ensuite seulement va accueillir le Messie ».

Pour toi, mon ami.e qui demande avec inquiétude : « à quand la fin du confinement pour faire la fête ? » je réponds : fais la fête aujourd’hui, dis merci à la vie, dans le respect de ce qui est prescrit et en te souciant de la vie d’autrui. Plante ton arbre maintenant et pense à la fin du confinement ensuite.

Ce Carpe diem n’est pas l’insouciance du futur mais la nécessité d’être ancré entièrement dans le présent, d’être présent à son présent. C’est vouloir avant d’espérer.

Rodney Barlathier

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